L’informatique à Grenoble

Difficultés et avancées


Après 1974, l'IMAG, comme l'ensemble de la recherche informatique en France, traverse une période difficile.

L'IMAG subit d'abord les restrictions budgétaires sévères qui suivent le premier choc pétrolier : les créations de postes sont bloquées ; les bourses de thèse elles-mêmes se raréfient, ce qui pèsera longtemps sur les recrutements ultérieurs. L'informatique, discipline très jeune et cherchant à s'affirmer, est particulièrement touchée.

L'IMAG souffre également de la politique à courte vue mise en place dans le cadre du plan calcul. Il devient impossible d'acheter une machine non française (ainsi, la communauté de recherche en informatique sera privée de tout accès au système d'exploitation Unix, initialement disponible uniquement sur du matériel américain DEC). Le projet de réseau Cyclades, dont Grenoble était un pôle important, est arrêté en 1978, alors que ses concepts étaient en avance sur ceux de l'Internet naissant.

Enfin, l'IMAG connaît à la fin des années 1970 une crise de croissance. Son organisation légère et peu formalisée, qui était bien adaptée à la taille initiale du laboratoire, ne fonctionne plus pour un ensemble comptant alors plus de 400 personnes (un exemple de dysfonctionnement est l'échec des négociations menées avec l'INRIA, à l'initiative de ce dernier, pour une implantation à Grenoble ; il faudra attendre 1992 pour que ce projet se réalise). Cette crise aboutira en 1983 à la scission de l'IMAG en plusieurs laboratoires.


Que peut-on retenir de l'histoire de l'IMAG dans ces années 1965-1980 ? D'abord, en dépit des difficultés évoquées, son affirmation comme un acteur majeur de la recherche française en informatique et mathématiques appliquées, et son enracinement dans le paysage scientifique et industriel local. Ensuite, son rôle de point d'appui à un éventail unique de formations dans son domaine, tant fondamentales que professionnelles. Enfin, les bases de quelques avancées scientifiques majeures. Citons, sans être exhaustifs :

  • Le système de gestion de bases de données Socrate, conçu et réalisé à l'IMAG en 1969-72 sous la direction de Jean-Raymond Abrial, et qui sera commercialisé par la société ECA-Automation.
  • La création du concept d'interprétation abstraite, développé en 1977 par Patrick Cousot dans sa thèse, base d'une puissante méthode de vérification de programmes.
  • Le développement, sous la conduite de Jean-Pierre Uhry et Christophe Lacôte, d'algorithmes et de logiciels pour le placement optimal de pièces pour la découpe, qui trouvera des applications dans des domaines très divers (industrie textile, construction mécanique). La société (SCOP) Alma sera créée en 1979 pour valoriser ces travaux.
  • Le travail de Joseph Sifakis sur les systèmes de transition, présenté dans sa thèse en 1979, qui devait conduire quelques années plus tard à l'invention du model checking, autre méthode de vérification de systèmes matériels et logiciels.

Voir la suite de l'histoire de l'IMAG.